J’aurais pu écrire ces lignes à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, mais il le faut maintenant, pour être dans l’air du temps « patriotique ». Les débats sur le patriotisme sont légions et la presse malienne dans son ensemble est accusée du manque de patriotisme et se voit comparer à RFI et France24 toujours à défendre la France selon les “nouveaux moralisateurs”.
Que vaut la presse malienne pour les autorités maliennes ? Question banale qui doit pourtant être au cœur de nos débats sur le patriotisme du journaliste malien. Pour ma part, je réponds : que dalle, nada, rien, nichts.
C’est dans ce pays que les médias protestent pour avoir un fonds de soutien Covid-19. C’est bien au Mali que depuis trois ans l’aumône de la Présidence de la République (200 millions FCFA) qui fait office d’aide à la presse n’est pas payée.
« RFI et France24… défendent toujours la France alors que les médias maliens ne font pas la même chose », j’entends ainsi formuler la plainte d’un membre du CNT à l’égard de la presse malienne. Quoi de plus normal. Ces médias sont dans leur rôle, au service de la diplomatie française. Qu’est-ce qui empêche l’Etat malien de faire pareil ? Ils sont pourtant contents nos dirigeants de s’entendre dans ces médias : BBC, VOA… en plus de ceux déjà cités. L’argent de leurs contribuables ne servira pas votre cause.
En 2021, la France a donné à ses entreprises de médias les fonds suivants : les aides à la diffusion – 39,4 millions d’euros ; les aides au pluralisme – 23,2 millions d’euros ; les aides à la modernisation – 55,5 millions d’euros. Ce n’est pas tout. Parce qu’elle distribue les journaux, la Poste a reçu plus de 80 millions d’euros. En 2019, Le Figaro, à lui seul, a reçu plus de 630 000 euros d’aide directe de l’Etat français. J’imagine le sourire de Madame Figaro.
En 2020, le Sénégal a octroyé 1,5 milliards FCFA aux médias. En Côte d’Ivoire l’aide à la presse au-delà du milliard FCFA, et dirigée par un organisme indépendant. Ces pays ont imité le Mali dans l’octroi de l’aide à la presse. Au Mali, l’aide octroyée depuis 1994 n’a pas évolué malgré le pullulement des titres. Pis, elle a été coupée. Les autorités politiques préfèrent maintenir la presse dans la précarité pour ensuite lui jeter des miettes et faire des journalistes des propagandistes à leur solde.
Chaque régime au Mali a sa presse et le pouvoir actuel n’échappe à la règle. Nous valons mieux que ça. Nous sommes les gardiens de la mémoire collective. Nous les voix des sans voix. Nous sommes, pour paraphraser Maximilien Robespierre, les gardiens de toutes les libertés dans une démocratie.
Les partis politiques se distribuent 4 milliards FCFA de l’argent du contribuable chaque année, alors qu’est-ce qui empêche le gouvernement malien de créer un média, instrument de sa diplomatie.
Aujourd’hui, le journaliste malien est si misérable que les meilleurs d’entre-nous ont préféré la communication dans les organisations. Nous autres, attendons d’avoir un poste de chargé de communication quelque part. En ce moment et seulement en ce moment-là, nous pouvons apparaître dans un bazin ou en costume cravate comme pour dire aux autres : “ j’ai réussi’’.
Cela dit, faites attention à ma photo, je porte du getzner. Connaissant mes amis facebookins, ils font semblant de ne pas voir le texte et un jour, paf voilà capture d’écran pour dire que la VAR a frappé Togola. On ne sait jamais, je pourrais me retrouver à Koulouba avec le retour de l’Etat au Mali.
Chers messieurs ‘’ très patriotes’’ faites en sorte que l’aide à la presse soit indexée au budget national avec un mécanisme de financement clair. Par exemple, la presse en ligne fait vivre les entreprises de téléphonie mobile pourquoi ne pas les taxer un peu. Quand même, les gens achètent des forfaits pour nos kpakpatoya.
Surtout dans les critères d’attribution de cette aide au cas où elle tombe, il faut que chaque média bénéficiaire souscrive à la Convention collective des médias, sinon on ne travaillera pas non plus, à cause des deuxièmes mariages de nos petits directeurs. Soyons clairs là-dessus, je parle des directeurs comme Ousmane Ballo, Abrahamane Sissoko ou Harber Maiga. Il parait que je dois déjà des colas à certains, je ne vais pas en rajouter !
J’ai peur d’être long sinon j’allais évoquer les interviews “ négociées” dans ces ‘’ grands médias” pendant qu’on méprise les médias nationaux. Chez moi à Bougouni on dit : “ Qui tue son chien méchant, risque de se faire mordre par celui du voisin”
Source: Mamadou Togola ,Malinewstv.com