Libération de Hamadoun Bah : Une justice à géométrie variable?

Sene Kunafoni

La libération de Hamadoun Bah, secrétaire général du SYNABEF et 1er Adjoint du Secrétaire Général de l’UNTM, met en lumière le caractère inégal et partial de la justice au Mali. Bah, arrêté arbitrairement le 5 juin 2024 dans le cadre de ses activités syndicales pour des motifs obscurs, a retrouvé la liberté le 8 juin 2024 après seulement trois jours de détention. Cette libération, bien que justifiée, soulève des interrogations quant à la partialité d’un système judiciaire fonctionnant au gré des intérêts politiques et militaires.

Une justice au service du pouvoir

Hamadoun Bah n’est pas une exception dans ce paysage de répression judiciaire basé sur des mensonges et des dossiers fallacieux. Sa libération après la grève de 72 heures du SYNABEF, reconduite ce lundi, révèle le manque de sérieux et l’instrumentalisation de certains magistrats au sein de la justice malienne.

Alors que les Maliens célèbrent cette libération, d’autres figures emblématiques, telles que Kalilou Doumbia, ancien secrétaire général de la présidence sous Bah N’Daw, Ras Bath, Mohamed Lamine Traoré, Étienne Fakaba Sissoko, Clément Dembélé, Adama Diarra alias « Ben le Cerveau », et Mamadou Diarrassouba, ont également été victimes d’arrestations arbitraires avec des dossiers vides. Leurs détentions prolongées sans procès équitable soulignent un schéma récurrent de justice instrumentalisée pour museler la dissidence.

Ras Bath, célèbre chroniqueur et activiste, a été maintes fois arrêté sous des prétextes fallacieux. Le 5 août 2022, il a de nouveau été arrêté pour des accusations de complot contre l’État et croupit toujours dans la prison de Koulikoro. Cette détention prolongée sans procès équitable met en lumière l’absence de preuves tangibles et la volonté manifeste des autorités de faire taire une voix critique envers le régime en place.

Lamine Seydou Traoré, ancien ministre des Mines et proche du puissant ministre de la Défense, a également subi la rigueur d’une justice expéditive. Arrêté le 12 janvier 2023 pour des accusations de malversations financières liées à la gestion de la compagnie nationale d’électricité EDM-SA, il est toujours en prison après plusieurs mois de détention injustifiée. Son cas illustre la volonté claire de décourager toute forme de contestation et de maintenir un climat de peur parmi les militants.

Étienne Fakaba Sissoko, professeur d’enseignement supérieur et analyste politique virulent, a été arrêté le 25 mars 2024 après la publication de son ouvrage « Propagande, agitation et Harcèlement : La Communication gouvernementale sous la transition ». Son arrestation a fait réagir l’organisation des droits de l’homme Amnesty International, qui organise actuellement une campagne pour sa libération immédiate et sans condition. Ses multiples arrestations depuis 2020 pour incitation à la révolte traduisent une intolérance systématique aux voix dissidentes.

Kalilou Doumbia, ancien secrétaire général de la présidence, a été arrêté le 6 septembre 2021 par les services de renseignement maliens. Sa détention, souvent sans procès équitable, souligne les pratiques autoritaires du régime actuel.

Une transition politique menacée

Le Mali, en pleine transition politique depuis le coup d’État militaire de 2020, ne peut se permettre une justice partiale et répressive. La stabilité du pays repose sur la transparence et l’équité de ses institutions. Ces différents cas illustrent une dérive autoritaire qui menace la démocratie naissante. Les autorités militaires semblent déterminées à s’éterniser au pouvoir, utilisant la répression judiciaire pour neutraliser leurs adversaires.

Une réforme judiciaire nécessaire

La libération de Hamadoun Bah devrait servir de catalyseur pour une réforme profonde du système judiciaire malien. Il est impératif de mettre fin à ces pratiques injustes et de garantir un traitement égal pour tous, indépendamment de leurs opinions politiques. La justice doit être le pilier d’une démocratie véritable, et non un outil de répression. La société civile et les institutions internationales doivent se mobiliser pour dénoncer ces injustices et exiger des réformes concrètes pour un Mali plus juste et équitable.

Les dirigeants doivent rapidement percevoir et déjouer ce piège. Les autorités judiciaires doivent être sensibles au contexte sociopolitique fragile que vit le pays et ne pas se fourvoyer sur les dangers d’une gouvernance trop répressive.

DDS

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