Commission Vérité Justice et Réconciliation (CVJR): Des témoignages éloquents sur des cas de « Disparitions forcées »

Sene Kunafoni

La CVJR a tenu, le samedi 3 avril 2021, au centre international de conférence de Bamako (CICB), sa 3ème audience publique non judiciaire sous le thème : « Disparitions forcées ».

Mamadou Bassirou Camara et Farouk Camara, tous frères de l’ancien responsable de l’Union Nationale des Élèves et Étudiants du Mali (UNEEM), Abdoul Karim Camara dit Cabral. En 1980 sous le régime de Général Moussa Traoré, ces deux frères poursuivirent leurs études en France quand Cabral fut arrêté par des agents de sécurité. Selon eux, certains membres de la famille furent arrêtés et torturés avant que leur frère ne soit retrouvé par ces agents. « Nous voulons tout simplement savoir où est enterré Cabral sinon nous n’avons besoin de rien », ont-ils martelé.

Dans leurs explications, les noms des anciens présidents Moussa Traoré et Amadou Toumani Touré ont été cités à plusieurs reprises. Ils auraient souhaité que cette audience se fasse en leur présence, mais Dieu en a décidé autrement. Puisque ces deux hommes (Moussa Traore et ATT) sont tous décédés, la tenue de cette audience non judiciaire a été une occasion pour les deux frères de Cabral d’adresser des messages forts à l’endroit des autorités du Mali. Ces messages sont surtout accentués sur les maux qui freinent le développement socioéconomique du Mali notamment la corruption, le népotisme, la mauvaise gouvernance.

Autres cas :

Depuis 2015, le mari de Fatoumata Traoré fut enlevé à Niafunké par les éléments du MNLA quand son mari et ses amis étaient partis chercher une nouvelle mariée dans un autre village. Au moment de l’événement, cette dame était enceinte et a accouché 3 jours seulement après la disparition de son mari. Jusqu’aujourd’hui, elle n’a aucune de ses nouvelles. Selon elle, les femmes des autres disparus sont remariées à d’autres hommes. Mais elle, elle est toujours à l’attente de son mari. Maintenant elle fait la cuisine pour des patients dans un centre de santé pour subvenir à ses besoins.

Donta Ag Sweillance, âgé de 65 ans est éleveur à Gao. Cet éleveur accuse l’armée malienne d’être l’auteur de la disparition de ses 2 neveux en 2012 à Sevaré. Il s’agit d’un enseignant en poste à Markala et un élève qui ont décidé d’aller passer les congés à Gao. Ayant emprunté le bus à Ségou, à chaque escale, des échanges téléphoniques se passèrent entre eux et les parents à Gao. Mais, arrivés à Sevaré, ces deux neveux furent enlevés par des militaires maliens, selon ses explications. Depuis ce jour, les parents sont restés sans nouvelles de ces deux disparus.

 

Les deux témoignages collectifs concernaient d’une part le cas Fily Dabo Sissoko, Hamadoun Dicko et Kassoum Touré dont les faits datent de 1962. D’autre part, le cas Abdoul Karim Camara dit Cabral en 1980.S’agissant du premier cas, les témoignages ont été apportés par Oumar Hamadoun Dicko, fils de Hamadoun Dicko ; El Hadji Boua Kanté Sissoko, fils de fils de Fily Dabo Sissoko ; et Mamadou Touré, fils de Kassoum Touré. Les faits datent de 1962 à 1964 sous le régime de Modibo Keita, premier président du Mali indépendant.

En 1962, le Mali dirigé par Modibo Keita avait choisi comme système politique, le socialisme qui conduisait le régime à créer le franc malien. Face à cette situation, des hommes politiques du Parti de la Solidarité et du Progrès (PSP) et des commerçants se sont opposés. C’est dans ce sens que plusieurs d’entre eux ont été arrêtés, jugés et condamnés à mort par un tribunal populaire puis envoyés à Kidal dont Fily Dabo Sissoko, Hamadoun Dicko et Kassoum Touré. Deux ans après, c’est-à-dire en 1964, ces trois hommes sont morts dans des situations troubles.

 

Issa Baradian Traoré 

 

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