Agée de 23 ans Aissata Ibrahima TRAORE est une étudiante en Master de la filière littérature et civilisation. Admiratrice du made in Mali, elle est « designer » et promotrice de deux plateformes de mode « I Parila & Lemounou ». Elle fait partie des Nyéleni de la mode au Mali pour la valorisation du bogolan dans toute sa splendeur. Sa plateforme « I Parila » consacré à la mode a pris le réseau social Facebook d’assaut grâce à ses créations et sa passion pour le bogolan. Cette passionnée du made in Mali a accordé un entretien au journal l’œil du Péon que la rédaction vous livre dans ce numéro.
Comment aviez-vous eu l’idée de créer une plateforme ?
J’ai toujours adoré la mode et les gens qui me connaissent le savent très bien. Et, avoir le courage de lancer mon entreprise sur la mode, je dirais que c’est un rêve d’enfant devenir réalité. Par ce que, disons que je voulais me lancer dans la mode, mais je ne me disais pas que ça allait avoir autant de succès. C’est quand même un succès inattendu bien que j’ai vraiment travaillé là-dessus et que d’autres efforts ont été conjugués au mien. Donc on va dire oui on a mérité un peu ce succès. Franchement, décidé de se lancer et poursuivre ses rêves d’enfant et la faire quelque chose de nationale, je le trouve vraiment assez fameux, voir extraordinaire.
Présentez votre Plateforme ‘’I Parila’’ !
I Parila est une plateforme de mode et de promotion du textile malien en général et du bogolan en particulier. Le but c’est de pouvoir confectionner des habits très modernes, lès amener sur des plateaux et des scènes chics et glamour. Car, nous avons remarqué qu’au Mali, à chaque fois que les gens portent le bogolan c’était de type traditionnel ou pour aller dans des soirées culturelles. Alors le but est aussi d’amener le bogolan sur des scènes plus stylé où on ne s’attend pas, où on s’attend à voir des tenues éloquentes. Avec notre Bogolan, ici au Mali nous pouvons nous retrouver devant des scènes de défilé à Londres pour valoriser le Made in Mali. Quant à Lemounou, elle est la plateforme de mode consacrée aux enfants.
Pourquoi ce nom ’’ I Parila’’ à votre plateforme, a-t-il une signification particulière pour vous ?
C’est vraiment compliqué quand on veut lancer une entreprise et qu’on veut chercher un nom qui est en rapport avec tous ceux que nous faisons. I Parila qui veut dire en bambara Vous êtes bien habillé ! Et ce nom va vraiment bien avec mon entreprise ! A la base, ce nom, je le dois aux enfants du quartier qui, à chaque fois que je sortais de la maison habillée en bogolan n’arrêtaient pas de me dire ‘’ I parila, I parila !’’, d’autres en chataient. Et je me suis dit, C’est vrai qu’en Afrique on dit que la vérité sort de la bouche des enfants, pourquoi pas donner ce nom à mon entreprise. Donc Oui ’I Parila a une signification pour moi
Que signifie le bogolan pour vous, pourquoi cette passion pour le Bogolan ?
Le Bogolan pour moi représente le Mali. Aujourd’hui, il existe deux (2) identités culturelles qui arrivent à se retrouver dans le bogolan (les bambaras et les dogons). Je trouve cela vraiment important, que ces deux cultures qui sont vraiment différentes arrivent toutes à avoir quelque chose en commun. A travers le bogolan j’ai compris énormément de choses. Sur les pagnes bogolan des dogons, ils exploitaient des masques venant de chez les peulhs et je trouve que c’était magnifique ! Cela prouve que Le port vestimentaire était culturel et permettait la cohésion sociale. Et c’est le seul tissu qui, pour moi, parle de cohésion sociale, d’amour entre les différentes ethnies et cultures. C’est très important. Surtout dans cette période de crise que vivons au Mali.
Le bogolan regorge des signes qui sont entre autre : le cauris qui représente la richesse, le bonheur avec le bien matériel. Le Kanaga qui est connu chez les dogons, il signifie la divinité Allah. Tandis que chez d’autre il signifie un Homme complet, un sage, l’homme mur donc le Kanaga n’est pas un simple lézard comme beaucoup le pense. Dans la société africaine, l’homme passait par différente science d’initiation, mais aujourd’hui ça a tendance à disparaître. L’homme passait par plusieurs écoles, les cases d’initiations.
Les maliens sont-ils vos seules cibles?
Non ! Car I Parila se retrouve hors du Mali ‘’Alhamdoulillah’’. Nous avons des clients un peu partout dans le monde. Le bogolan est entrain de quitter carrément le cadre malien, je ne sais pas si les maliens se rendent compte, mais si on ne fait pas attention nous allons perdre notre bogolan et d’autres vont s’en approprier. Dans les plus grands défilés européens on retrouve le wax, donc le bogolan va s’y retrouver très bientôt. Ce qui veut dire que les maliens ne sont pas les seuls ciblés, si nous faisons des créations ce n’est pas seulement pour les maliens, mais aussi pour que le monde entier puisse le porter. Si I parila a ajouté le traditionnel au moderne c’est pour que bogolan soit porter au quotidien pour aller au bureau. Et, c’est ce que nous proposons à nos clients afin que le bogolan quitte un peu le cadre traditionnel donc on a joint le moderne au traditionnel. Pour que le bogolan se retrouve sur les scènes internationales.
Que signifie la culture pour vous ?
Elle signifie énormément de choses! La culture est comme notre identité, notre appartenance. Un homme sans culture n’est absolument rien ! Mais avec la mondialisation on a tendance à se perdre ! Aujourd’hui, le japon est considéré comme l’une des puissances économiquement très riche, mais il garde sa culture ce qui nous prouve que même avec la mondialisation nous devons garder notre culture, c’est vraiment important. Au Mali on a tendance à ouvrir le bras à beaucoup de culture, mais nous ne savons pas souvent d’où nous venons. On peut se développer tout en restant fidèle à sa culture, I parila en est la preuve. Sachons faire la part des choses, prenons chez l’autre ce qui est bien n’oublions pas d’où nous venons et ce qui est propre à nous. Surtout les jeunes, prenons ce qui est bien chez l’autre.
Les difficultés dans le cadre de votre travail ?
Je ne vais pas vous dire que c’est facile. Au Mali les gens sont trop habitués à marchander les prix, ils pensent que nous mettons le prix haut. Alors que le boulot que nous nous faisons n’est pas facile. Nous fixons des prix en fonction de beaucoup de chose, ils ne sont pas fixés à la légère mais après murs réflexion, de la même manière qu’on lance une collection. Les maliens doivent savoir dissocier le social du business, les gens qui peuvent nous aider à améliorer notre entreprise c’est eux même qui nous faites couler qui demandent plus de gratuit. La poche de l’entreprise ne doit pas se mêler de la poche de l’entrepreneur c’est ce que les maliens doivent comprendre.
Etudes et carrière professionnelle ?
C’est vraiment compliqué de joindre les études et la carrière, j’essaie d’être aux mêmes niveaux que les autres étudiants. Pourtant j’ai une entreprise à faire tourner. C’est vraiment difficile et psychologiquement ça demande énormément d’efforts. Mais ça va Alhamdoulillah j’arrive à joindre les deux bouts.
Réalisé par Oumou Fofana