In memoriam : Soumaila Cissé, Chef de l’Opposition Parlementaire et Président du Parti URD

Sene Kunafoni

Le Républicain s’est endormi à jamais ! Le technocrate-politique s’envole pour un voyage dans les cieux sans retour !

Une lumière politique du Mali et de l’Afrique s’est éteinte !

Le Mali et l’Afrique perdent l’une des plus grandes figures politiques contemporaines !

L’homme de tous les combats de la démocratie, a rejoint la terre de ses ancêtres sur la pointe des pieds, sans faire grand du bruit, dans la plus grande discrétion !

L’homme politique Soumaila Cissé, revenait d’une traversée du désert pendant six (06) longs mois de captivité, dans les mains des groupes djihadistes sans loi, ni foi. Il était entre vents et marées, entre espoir et désespoir, entre vie et mort, des oubliés de la République ! De par son courage et sa détermination, il avait réussi à survivre à la tempête, à la dure épreuve de sa captivité, à l’isolement, à la solitude, à la soif, à la faim, à la peur, à l’angoisse, à l’anxiété, à la douleur, à la nostalgie et du manque de confort.

La libération de Soumaila Cissé, fut obtenue grâce à la détermination des autorités de la transition, après le coup d’Etat du 18 Août 2020. De retour à Bamako, entre ses siens. Sa libération fut diversement interprétée au niveau des médias nationaux et internationaux, et des réseaux sociaux. Si d’aucuns voyaient en sa libération une victoire pour la démocratie Malienne, parce qu’il avait été enlevé en pleine campagne électorale pour les législatives de 2020. D’aucuns voyaient en sa libération dont les conditions étaient basées sur les échanges de prisonniers djihadistes et d’une manne financière (rançon), une menace pour la sécurité nationale, dans un pays assujetti sur tous les plans par une crise multidimensionnelle dont les capacités opératoires et opérationnelles de notre appareil de défense sont faibles devant la capacité de nuisance de l’ennemi redoutable (terrorisme), qui utilise la tactique de la terre brûlée.

Par ailleurs, on aurait vu un Soumaila Cissé, affaibli physiquement par la maladie, abattu moralement et psychologiquement dérangé, mais l’homme de courage et des décisions réfléchies, s’affiche avec foi et un moral d’acier lors des quelques sorties médiatiques après sa libération.

Homme politique et homme d’Etat, il avait occupé plusieurs postes de responsabilité sous le Président Alpha Oumar KONARE, Secrétaire général de la Présidence de la République, Directeur de l’ACI. Il fut nommé ministre des finances en 1993, ministre des finances et du commerce en 1994, de nouveau ministre des finances en 1997 et ministre de l’équipement, des transports, de l’aménagement du territoire, de l’environnement et de l’urbanisme en 2000. Il fut président de la commission de l’UEMOA 2002-2011 où, il introduisit d’énormes innovations institutionnelles et économiques, afin que l’institution puisse être un vrai outil d’intégration des Nations et des Peuples Ouest-africains. Partout où, Soumaila Cissé avait occupé des postes de responsabilité, il laissa des traces ineffaçables d’un technocrate averti, d’un visionnaire aguerri des défis et d’un leader éclairé.

Il fut trois fois, deuxième à la présidentielle du Mali. En 2013, juste après l’annonce des résultats provisoires du deuxième tour de la présidentielle par le ministère de l’administration territoriale, grand challenger du candidat du RPM, le président Ibrahim Boubacar KEITA, il reconnaît illico presto, sans détours la victoire de ce dernier. Avant la validation des résultats par la Cour Constitutionnelle, il se rendît, chez ce dernier, en compagnie de son épouse et deux de ses fils, pour lui, adresser ses vives félicitations. Ce geste républicain, fut accueilli au sein de l’opinion publique nationale, de la presse nationale et internationale, comme une leçon de démocratie en Afrique et au monde.

Homme politique très intelligent, très courtois, très respectueux, très ouvert au dialogue. Il fut un homme de paix, de tolérance, de justice, de courage, de détermination, de patience et de pardon. Sa vie fut remplie que de défis.

Soumaila Cissé aimait profondément le Mali, qu’il portait dans son cœur, sans démagogie, sans aucune forme d’hypocrisie, jusqu’à son dernier souffle sur terre. Homme politique de combats et de défis. Il s’est battu durant quarante ans de vie politique, sans repos. Victime de plusieurs trahisons, de coups bas de la part de certains de ses anciens collaborateurs. Homme de foi et de tolérance, il n’a jamais daigné les critiquer, parce que selon lui, les relations sociales et humaines étaient au-delà de la vie politique qu’on ne pouvait transgresser pour des intérêts politiques.

Homme politique aguerri des tsunamis et des adversités politiques. Il aimait les rapports de force et le jeu des acteurs politiques, mais jamais, il n’a franchi, une seule fois, les limites politiquement, juridiquement, constitutionnellement, socialement et humainement acceptables. Il aimait les compromis basés sur l’idéal démocratique et les compromissions basées sur l’idéal constitutionnel, allant dans le sens de la stabilité du pays, sans se compromettre dans le jeu politique des intérêts machiavéliques et sordides. En voyant l’annonce de la mort de Soumaila Cissé sur les antennes de France24 ; j’ai sursauté de peur, d’angoisse, de désespoir et d’anxiété, et mes larmes furent de partout comme les vagues de l’océan atlantique, en témoignage des rapports sociaux que j’entretenais avec lui, ses visites lors de mes événements, de mon mariage en passant par les baptêmes de mes enfants chez moi, à domicile.  Endeuillé et mouillé comme une poule, mes souvenirs furent tournés, avec une pensée pieuse pour d’autres types d’hommes d’Etat morts, avec des valises de projets pour le Mali, comme les feus : Tiéoulé Mamadou Konaté et de Boubacar Sada Sy, arrachés à l’affection du peuple Malien, quand leur notoriété et leur popularité montaient en sondage de façon exponentielle au sein des masses populaires, de la classe et sur la scène régionale et internationale, de par, leur vision et de leadership éclairé. Hélas, les cimetières sont remplis par les meilleurs !

A chaque rendez-vous, quand la maison familiale (le Mali) chavirait, il répondait aux sollicitations du peuple, avec des propositions concrètes de sortie de crise. Il n’a jamais trahi ce serment qui le liait au Mali, sous aucun prétexte de quelque nature. Sa libération avait suscité tant d’espoirs pour le renouveau politique, mais hélas, la grande faucheuse, la mort emporta Soumaila Cissé, ce vendredi 25 Décembre 2020, jour de la célébration de la fête de Nativité, chez nos frères et sœurs chrétiens.

Soumaila Cissé, le fils de Bocar Cissé, le baobab de Nianfuké, a gagné beaucoup de combats, mais il perd le dernier, face à la mort ! Ainsi va la vie !!!

SAYA Yé Makari Baliyé !

Dougoukolo Yé Mientô Gban Zan Yé !

Toutes nos condoléances à sa famille biologique et politique !

Qu’Allah l’accueille dans son paradis éternel !

 

Bréhima Mamadou KONE, Enseignant de Sociologie Politique et de Sciences politiques au département Socio-Anthropologie de l’Université de Kabala, Faculté des Sciences Administratives et Politiques (FSAP)

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